La peur des perturbateurs endocriniens : réalité, polémique ou phobie ?

Publié le dans Santé.

La reproduction et la santé humaine seraient mises en danger par la présence de phtalates et autres perturbateurs endocriniens dans notre environnement. C’est ce que porte à croire certains résultats présentés par le Réseau Environnement Santé (RES). Faut-il céder à la panique ? Peut-être devrions-nous d’abord comprendre les faits pour juger nous-mêmes de la situation.

Santé : campagne d’information « Hold up sur la fertilité »

Courant avril 2012, le RES a secoué l’opinion publique en lançant une campagne d’information sanitaire nommée « Hold up sur la fertilité ». En pratique, il souhaitait mettre en garde le plus grand nombre contre les méfaits des phtalates et autres perturbateurs endocriniens sur les troubles de la reproduction de l’espèce humaine. Ces produits, d’origine naturelle ou artificielle, sont partout dans notre environnement et de nombreux effets sanitaires semblent leurs être imputables tels que des troubles de la fertilité et une propension à développer l’obésité et le diabète.

Les perturbateurs endocriniens, c’est quoi ?

Les perturbateurs endocriniens sont des substances capables d’interférer avec le métabolisme des hormones naturellement produites par notre organisme. Ils sont répartis en deux grandes classes d’hormones :

Les hormones naturelles autrement dit les œstrogènes, la progestérone et les phytoestrogènes.
Les substances anthropiques, c’est-à-dire liées à une intervention humaine telle des hormones de synthèse ou des produits chimiques divers (certains phtalates, bisphénol A, certaines dioxines, les PCB, chlordécone…)

Si le terme de perturbateurs endocriniens chimiques apparaît en 1993, 20 ans plus tard, la définition précise n’est toujours pas en place : des molécules sont considérées comme des perturbateurs endocriniens avérés tandis que d’autres sont suspectés.

Impact des phtalates sur l’obésité et le diabète ?

L’enquête National Heath and Nutrition Examination Survey (NHANES), réalisée de 1999 à 2002, a étudié l’effet de plusieurs métabolites (produits de dégradation) de phtalates fréquemment utilisés chez les Américains. Les premiers résultats, qui doivent être confirmés, suggèrent que l’exposition aux phtalates pourrait contribuer au développement de l’épidémie d’obésité abdominale et de résistance à l’insuline que les médecins maîtrisent difficilement depuis quelques années (Stahlut RW 2007).

Phtalates : attention à notre alimentation

La voie de contamination principale des phtalates et des perturbateurs endocriniens est l’alimentation hors apport hydrique. Cette source d’exposition majeure est représentée en premier lieu par les produits laitiers, la viande et les poissons. Des études ont montré que des teneurs de nonylphénols entre 0,1 et 20 microgrammes/kg avaient été détectées dans des tomates, des pommes, du beurre et du chocolat.

D’autres données, plus étonnantes, attirent l’attention sur la présence de phytoestrogènes dans des aliments à base de soja avec des taux pouvant s’avérer quasi similaires aux doses d’estrogènes prescrites dans le cadre d’un traitement hormonal substitutif.

Perturbateurs endocriniens et eau du robinet

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que l’eau potable ne constitue a priori qu’une voie mineure d’exposition aux perturbateurs endocriniens. Des données sur le nonylphénol ont indiqué que leurs apports dans l’eau de boisson restent très inférieurs, après traitement, à ceux de l’alimentation.

Les réseaux de traitement de l’eau potable française utilise des méthodes d’affinage (adsorption sur charbon actif, ozonation et membranes) qui sont très performantes vis-à-vis de la plupart des perturbateurs endocriniens. De plus, des traitements biologiques réalisés au niveau des stations de dépollution des eaux usées suffisent, en général, à réduire de façon significative leurs concentrations dans l’eau du robinet.

Nous pouvons donc être rassurés. Les connaissances actuelles indiquent que le risque d’une contamination significative de l’eau potable par des perturbateurs endocriniens semble peu probable.

Protéger les nourrissons et les femmes enceintes contre les perturbateurs endocriniens

Le petit poids des nourrissons et des prématurés les fragilise face aux perturbateurs endocriniens que ce soit par du lait maternisé à base de soja ou par des produits cosmétiques. Une étude pointée par le RES démontre que chez 163 nourrissons nés entre 2000 et 2005, 81 % d’entre eux présentaient au moins 7 métabolites de phtalates dans leurs urines. Ces dosages étaient fortement corrélés à l’utilisation des produits de soins corporels (Sathyanarayana 2008).

Les femmes enceintes devraient également limiter les contaminations par les perturbateurs endocriniens. En pratique une femme enceinte, contaminée en 1ère génération, porte un fœtus, contaminé en 2ème génération, qui lui-même possède des cellules reproductrices contaminées en 3ème génération.

https://www.cieau.com/l-eau-potable/des-traitements-sophistiques

 

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